Qui a oublié de dire aux moustiques de rester confinés ?

BZZZZZ.
Je vole au-dessus de la ville. Plus un humain. Où sont-ils tous passés ?  
Le calme et le manque d’agitation me troublent, tout est bizarrement silencieux.
Je me sens seul et affamé.
Ils se sont tous volatilisés un mardi de mars, en laissant les rues désertes et propres.
Comment vais-je me nourrir ? Certains avaient un sang si délicieux.
Particulièrement ceux qui mangeaient de la viande saignante.
Leur sang n’en était que plus succulent et revigorant. 
Par contre, les bouffeurs de tofu, ah pardon, mais non merci !
Ils me laissaient un goût d’éponge insipide, très peu pour moi !
Si les rues sont abandonnées, les fenêtres sont, elles, plus ouvertes qu’avant.
Je ne suis pas un vampire, je n’ai pas besoin d’une invitation pour entrer.
Je me précipite, attiré par une proie penchée sur un carnet.
Je lui tourne autour, je survole le papier, elle raconte mon histoire.
Je vais me faire le plus discret possible. Son odeur est absolument exquise.
J’en ai les mandibules qui frétillent.
Nom d’une chauve-souris, elle m’a repérée !
Mes collègues m’avaient déjà conté cette fontaine de Jouvence,
qui vous envoie au paradis dès la première gorgée de sang dégustée.
Je m’éloigne pour mieux me rapprocher.
J’observe son cou où l’exhalaison est à son paroxysme.
La tentation est si grande que je ne fais pas attention à la gigantesque forme jaune, que la créature tient dans sa main gauche.
Je me dirige droit sur son cou et la promesse d’un plaisir sucré.
 
            — Pafff ! Un bruit assourdissant et un coup violent me laissent à moitié mort, titubant, essayant de reprendre mon souffle. Je suis transporté sur un tapis volant en plastique jaune vers la fenêtre.

            — Pour cette fois, je te laisse la vie sauve, mais vas transmettre à tes semblables d’aller se nourrir ailleurs. J’en ai marre, je ne suis pas un open-bar ! déclare la créature exaspérée. 

Je m’envole tant bien que mal.
Je vais reprendre des forces chez ses voisins.
La naïveté des humains m’étonnera toujours, car quoiqu’il arrive, un moustique digne de ce nom ne renonce jamais à sa proie. 

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